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Philosophie qui vit,  Une italienne à Paris

Ciao, ciao Paris !

Je suis épuisée. Depuis plusieurs mois le stress et la fatigue s’accumulent, je ne dors pas la nuit, le matin j’ai de la peine à retrouver une bonne énergie. Mes petits soucis de santé se succèdent en se donnant le relais : avant c’était la jambe et le dos, maintenant l’intestin et ses crises hémorroïdaires. 

Le besoin d’avoir un chez moi devient de plus en plus fort. La recherche d’une stabilité à la fois économique et locative est au présent une exigence. Ma liste de priorités a changé et tout ce que je rêve c’est un petit studio à la mer où pouvoir enfin m’apaiser et écrire. 

Le tourbillon parisien ne m’enthousiasme plus, je ne vois plus la beauté de la ville. Je me demande d’ailleurs si Paris n’a jamais été belle et je conclus qu’elle est sublime la nuit, pourtant cément gris le jour. Je respire un air de détresse collective, j’aperçois la métropole en agonie.

J’écris à mon médecin qui me répond de faire attention à ce que je mange, car l’une des premières causes de crise hémorroïdaire est la constipation. Bien que j’aie une alimentation saine et équilibre et que je ne boive du vin que très rarement, j’arrête l’alcool, les épices, le chocolat, le thé, les aliments gras. Le seul plaisir que je n’arrive pas à supprimer totalement c’est le café (c’est très dur quand tu es italienne et que tu as une superbe mokina Bialetti chez toi), mais au moins je limite sa consommation à deux petites tasses par jour. 

Malgré cela, le souci persiste. Ce n’est pas l’alimentation, j’en suis persuadée, c’est le style de vie qui ne convient plus à mon corps. 

Il y a trois ans, je pouvais tout manger sans me faire aucun souci. Depuis mon arrivée dans la ville des Lumières j’ai déménagé onze fois. Il s’agissait toujours de locations précaires chez l’habitant de la durée d’une semaine, vingt jours, un mois, quatre mois, huit mois au maximum. En parallèle j’enchaînais les petits boulots soit dans la restauration soit dans la vente. J’étais jeune fille, naïve et rêveuse, qui cherchait le sourire perdu. J’ai ainsi appris à profiter des petites choses que la vie m’apportait, sans rien attendre, sans rien prétendre. J’adorais Paris et je m’y voyais vivre pour longtemps. 

Pourtant cette période ne peut plus durer. Aujourd’hui je suis une jeune femme, mes besoins, mes aspirations ont changé et me forcer de rester dans un environnement qui m’est devenu hostile ne sert à rien. Il faut suivre le courant plutôt que nager contre.  

Je réserve alors un aller-retour Paris-Cannes. Puis je décide différemment : mon contrat s’arrête le 1 novembre, je n’aurai plus aucune contrainte qui me tient à Paris, rien ni personne. L’instinct me dit que le temps est venu : je dois faire la paix avec mon pays.

Depuis mon départ je me suis ouverte totalement à tout ce que Paris aurait pu m’apporter sans me donner aucune limite ni concernant le temps (combien de mois j’allais rester) ni les expériences professionnelle (serveuse, vendeuse, nounou, traductrice, comédienne, agente d’accueil au cinéma, … j’ai accepté chaque offre où je sentais qu’il y avait quelque chose qui nourrirait ma curiosité). Pourtant, avec le recul, je reconnais qu’en même temps que j’ouvrais ma vie à Paris, je la fermais à mon beau pays. 

Pendant ces années d’existence parisienne, j’associais l’Italie à ma famille, à mon passé, à ma souffrance. L’Italie était tout ce que je voulais oublier pour redémarrer ailleurs. Sauf que, au bout de trois ans, je me suis rendue compte que mon avenir n’est pas forcément à Paris. Paris a été une parenthèse essentielle pour mon épanouissement personnel, peut-être elle doit rester telle quelle.  

Je rentre à Vérone pour me réconcilier avec tout ce qui a été avant juin 2018. Puis je n’en sais rien. 

Paris, Cannes, Vérone, Milan, ailleurs… tout devient de nouveau possible après avoir fait la paix avec son propre pays. 

©Eleonora Filippi

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